Mehdi KOURDES, le « minot » Floiracais touché mais pas coulé !

Le portrait de la semaine 

Mehdi KOURDES, le « minot » Floiracais touché mais pas coulé !

 

Dès mes premiers pas dans l’enceinte de J.R. GUYON, mes connaissances ne parlaient que de lui, la dernière recrue en date du quinze « Sang & Or ». « Un pilier de 150 kg, tout jeune, en provenance du B.O., le BIARRITZ OLYMPIQUE ! » Piquée au vif, ma curiosité me conduisit tout naturellement vers ce « beau bébé », un peu en retrait de la tribune, capuche sur la tête et lunettes de soleil vissées sur le nez. Je ne sais pas si vous avez pu approcher quelques fois un Uini ATONIO ou un Georges-Henri COLOMBE, colosses du rugby parmi les plus connus… Mais vous avez le même ressenti en approchant Mehdi KOURDES, le « minot » issu de FLOIRAC et qui revient à la case départ. Le portrait :

Après s’être présenté sommairement, Mehdi poursuit : « J’ai 24 ans, je mesure 1m 93 et pèse 148 kg. J’arrive de BIARRITZ et je reviens là où j’ai fait mes premiers pas avec le ballon ovale. Derrière l’école de rugby, j’ai enchaîné avec le centre de formation puis la filière Espoirs de l’U.B.B. J’ai tutoyé l’équipe professionnelle avant de signer au B.O. Il y a eu quelques problèmes sur la route, on va dire ça… et je reviens à la case départ. » Pudique, notre jeune homme veut aujourd’hui tourner la page de moments très difficiles à vivre. Mais devant notre insistance, il revient sur son parcours au Pays Basque. « Je me suis blessé au dos. Après de longs moments de doute, j’ai passé une visite médicale. Le diagnostic est tombé. Il a été terrible… Le club et moi avons décidé d’interrompre mon contrat d’un commun accord » …

Mais lui a-t-on vraiment laissé le choix ?

Mehdi KOURDES est l’incarnation parfaite de tous ces gamins, repérés dès l’adolescence par les grosses écuries de rugby professionnel. Ses mensurations le plaçaient alors au-dessus du lot des ados de son âge. Il a été choyé, protégé, formé pour assurer l’assise des mêlées de son équipe. Trop jeune pour intégrer l’équipe 1 de l’U.B.B., le B.O. lui offrait l’opportunité de se mesurer à l’élite des piliers de la Pro D2 et de gagner du temps de jeu. Et puis le corps qui cède, la blessure rédhibitoire pour un pilier souffrant des lombaires. Et du jour au lendemain, il est « rayé » de l’organigramme du club. Il se retrouve brutalement sans travail, sans logement, sans voiture à disposition et sans formation professionnelle initiale, sans pour autant avoir préparé « l’après rugby ». Combien sont-ils ainsi de jeunes qui vivent leur passion sans pour autant être préparés à « quelques problèmes sur la route » pour reprendre la formule de Mehdi ? Mais cette rubrique n’a pas pour objet d’apporter des solutions à des difficultés inhérentes à la professionnalisation du rugby. Retournons auprès de notre dernière recrue qui a repris l’entraînement avec le F.R.D.R. avec la ferme intention de reprendre du plaisir sur les terrains de rugby, fut-ce à un niveau inférieur à ce qu’il a connu jusqu’ici.

Après sa blessure, personne n’a sollicité Medhi. Quand on lui cite les clubs amateurs de la côte BASQUE qui lui auraient permis de se relancer, il précise : « Même si j’avais été contacté, j’aurais choisi de revenir sur BORDEAUX. » La blessure morale était trop profonde ! Le F.R.D.R. et le joueur ont trouvé un terrain d’entente très facilement. « D’abord, il faut que je retrouve du plaisir à rejouer. Pendant le même temps, le club va m’accompagner dans mes démarches d’insertion professionnelle.

Avec le rugby jusqu’ici, ce n’était pas la priorité. Ce n’est pas ce qu’on nous met dans la tête depuis tout petit. Et puis j’avais l’impression de vivre comme dans un rêve jusqu’à la blessure.»

Si nous faisons la rétrospective de sa jeune carrière, Mehdi ne met pas en avant son passage auprès des pros de l’U.B.B. ou son séjour en ProD2. Son visage s’illumine lorsqu’il revient sur ses années au centre de formation bordelais. Il a fait de très belles rencontres avec des jeunes de son âge qui, aujourd’hui, sont encore des relations suivies. Parmi elles, son alter-ego, Jean Denis KASALA, pilier de son état et de nouveau coéquipier sous les couleurs « Sang & Or ». C’est aussi durant ces années de formation qu’il a pu se forger une personnalité et un style propre. « Je ne me suis jamais identifié à un joueur en particulier. J’observais beaucoup mes aînés. J’essayais de prendre ce qui pouvait me servir à être plus performant. Je n’ai jamais eu envie de ressembler à quelqu’un. J’avais surtout envie de créer mon histoire et de construire ma carrière en fonction de ma personnalité ».

Difficile encore aujourd’hui de faire référence à ce passé douloureux pour notre jeune recrue qui poursuit : « Mon métier, c’était le rugby. C’est compliqué encore maintenant de passer à autre chose. Je viens de reprendre les entraînements. Il va me falloir m’occuper sérieusement de mon avenir professionnel » ajoute-t-il. « Avec BIARRITZ, on n’a pas parlé de mon avenir. On s’est mis d’accord sur une interruption du contrat, c’est tout ! Tout le monde sait que dans le monde du rugby, la blessure qui éloigne du terrain marginalise l’homme. L’entourage est moins présent, très vite, vous êtes oublié et le B.O. ne fait pas exception à la règle à ce niveau. »

Et c’est ici que le projet du F.R.D.R. prend tout son sens ! « Avec ce garçon, il y a beaucoup de travail avant qu’il ne devienne opérationnel, mais il est encore jeune. C’est aussi pour relancer des « revanchards », des déçus du monde professionnel que j’ai signé ici. La dimension humaine du projet est au moins aussi importante que la recherche de résultats sportifs » précise Christophe HAMACEK, le manager général, enthousiaste à l’idée de participer à la reconstruction de son nouveau protégé.

Nous savons aussi combien la compétence sociale du club est chère au « patron », Nicolas GUYAMIER. Tous les voyants sont au vert pour Mehdi KOURDES qui doit maintenant tout faire pour aller chercher le maillot floqué du numéro 3 et retrouver du plaisir au sein d’un club « familial ». Si FLOIRAC l’a vu naître et grandir, c’est bien à FLOIRAC qu’il pourra panser ses plaies à l’âme et se reconstruire en tant qu’homme.

Rédigé par Jean-Claude Dumé